Louer un de nos châteaux dans la vallée de la Loire, (Beaumont, La Douve d’Armaillé, La Ménaudière, Bois de la Lune ou Villers-en-Ouche) c’est vivre l’Histoire des Rois de France. Depuis votre château, allez au château de Blois, ce fleuron de la Renaissance, où tout a été pensé pour vous faire vivre une expérience extraordinaire. Sous l’influence de la Renaissance italienne, le château connaît d’importantes modifications qui lui conféreront son hospitalité si caractéristique. Il est peu de lieux historiques où le visiteur se sent mis à l’aise « dans sa naturalité à lui ». La grande majorité des châteaux et monuments historiques ouverts au public se contentent du service minimum: s’ouvrir au public comme minimum syndical. Le but n’est pas de partager ce patrimoine commun qu’est notre histoire, mais de contribuer aux finances. Dans les deux cas, aucun des deux n’est atteint, faute de capacité à s’ouvrir à l’autre, tel qu’il est.
Renaissance et humanisme
Plus le lieu a abrité une histoire longue et riche, a fortiori des rois et reines de France (et de Navarre), plus chacun d’entre nous va ressentir cette mise à distance historique et toujours palpable qui a été « étudiée pour » : un château royal, c’était d’abord le lieu de signification de la puissance royale, une communication pensée et assumée comme telle visant à signifier au visiteur les rapports de force envers l’autre : Chambord comme l’un des moyens pour François 1er d’inférioriser Charles Quint, Versailles pour rappeler à la noblesse qui l’a faite noblesse pour Louis XIV, etc.
L’évolution des modes de vie, les changements de culture participent aussi de cette mise à distance : chaque élément d’un tableau du moyen-âge ou d’une frise de cheminée signifiait à l’évidence et sans besoin de « médiateur » aucun, un message au visiteur de passage. Le porc épic de Louis XII et sa devise « cominus et eminus », la salamandre de François 1er « nutrisco et extinguo ». Cette capacité à décrypter immédiatement l’environnement, nous l’avons perdu, ne restent pour nous que des énigmes de pierre ou de peinture en forme de rébus à l’intérieur d’une devinette : le plus sûr moyen de nous faire sentir notre étrangeté en ces lieux. Etrange à ces lieux et à cette culture, tu es, et tu resteras.
D’où à contrario cette magnifique exception qu’est le château de Blois d’ouverture à l’autre, de soin apporté à ce qui est le plus difficile à réussir en la matière, mettre son visiteur à l’aise, lui faire sentir toute la bienveillance apporté à l’hôte. Je te veux du bien, je veux que tu te sentes bien en ces murs, l’espace d’un instant, que tu te les appropries toi aussi ! Un esprit humaniste a élaboré par petites touches, de petites attentions, oh certes rien de bien extraordinaire ! des modes d’appropriation des lieux par tous, grands ou petits, natifs ou étrangers, cultivés ou pas : tous également traités et, donc respectés.
Hospitalité et château de Blois
Dans la salle royale, un détail très simple et pourtant important, un trône sous son dais de satin bleu orné de lys blancs, l’imaginaire même du trône « royal », mais un trône ouvert à tous : il vous tend les bras et n’attend que vous, il vous invite l’espace d’un instant à venir « trôner ». Ouverture à l’autre simple visiteur, mais ouverture à l’opposé de la fermeture qui se pratique partout ailleurs où les cordelettes rouges sont là pour vous rappeler à l’envie, et pour de très bonnes raisons professionnelles, que vous êtes là pour être canalisés en troupeau docile dans le bon itinéraire fléché à l’avance. Les bisons pas très futés sont nécessaires aux finances mais pas vraiment souhaités : au-delà de cette limite immédiate, votre ticket n’est plus valable, gardez vos distances, restez spectateurs.
Cette volonté d’ouverture à l’autre « fonctionne » : il n’est que de voir l’appropriation immédiate du trône et de sa fonction ; chacun de prendre une pose « royale » ! Laquelle ne peut que provoquer le sourire condescendant du professionnel des lieux et de l’histoire, mais qui aura, ne lui en déplaise, malgré lui et sa morgue, permis au visiteur de co-créer (pour la première fois de sa vie ?) son approche individuelle de l’histoire de France et de ce qu’était une reine ou un roi.
Sur la terrasse ensoleillée qui domine la ruelle en contrebas, la même volonté bienveillante a disposé du mobilier de jardin qui ne demande qu’à vous accueillir. Détail diront les esprits condescendants et experts. Certes ! Mais le paradis est fait de détails dès que ceux-ci rendent compte de l’amour qui a poussé à leur création. Un service de qualité s’apprécie par sa négation, la norme est de mettre le visiteur en mouvement, on n’est pas un lieu de vie, mais un lieu sérieux de ce que doit être un monument digne de son histoire. Imaginer un seul instant seul lieu qui permette au visiteur de se poser, de vivre un moment de tranquillité comme l’ont aussi vécu l’homme François 1er, la femme Marie de Médicis en ces lieux, c’est rare et c’est à Blois.
Anonyme organisateur, je te salue et je te célèbre comme un humaniste avant d’être un historien, ou comme le meilleur des historiens, celui qui se veut ici et maintenant ouvert à l’autre, humain tout simplement.